
Cette anecdote est tirée du livre suivant : Etude et Récits sur Alfred de Musset, Alix de Janzé, Paris, Librairie Plon, 1891.
Une aventure singulière qu’Alfred aimait à raconter avait failli compromettre sa candidature [à l’Académie]. Dans sa tournée de visites réglementaires, il va voir un jour le comte de Saint-Aulaire au château d’Etioles, près de Corbeil.
Comme il arrivait à la grille, un chien crotté, le poil hérissé, entre derrière lui, pénètre à sa suite dans le château sans qu’il y prenne garde, le suit dans le salon où il se tient d’abord timidement à l’écart. Le comte arrive, reçoit le poète avec la grâce affable d’un seigneur d’autrefois, et, après une spirituelle et aimable causerie, lui demande de « lui faire ainsi qu’à sa famille le plaisir de rester à dîner. »
Ce qu’entendant le chien, et comme s’il eut compris ce que ce mot de dîner renfermait de promesses, il relève l’oreille, agite la queue, signe de contentement comme on sait de la race canine, et s’en vient faire le beau et flatter le maître de ce logis hospitalier. Le comte, persuadé que cet affreux chien appartient à son hôte, lui fait, à regret, une petite caresse mais il se disait :
« il faut avouer que les poètes ont de vilains compagnons ; » et le poète, de son côté, s’étonnait de voir un pareil chien dans une maison si bien ordonnée.
L’animal, enhardi par cet accueil, se met à son aise, se vautre sur les meubles, et bientôt il suit la compagnie dans la salle à manger, où il se livre aux plus indiscrètes demandes, qu’il couronne en dérobant le rôti qu’il emporte pour le dévorer. « Voilà un chien de bon appétit », fait doucement M. de Saint-Aulaire. Alfred de Musset comprend alors le quiproquo dont il est victime, et il s’écrie : « Monsieur le comte, et vous, Madame, sachez que je ne connais pas le moins du monde cet affreux animal… Et moi, stupide, qui le croyais de la maison ! » La contrainte que la compagnie avait eu peine à dissimuler se dissipa aussitôt et fit place à une vive hilarité.
À ce moment le chien reparaissait repu et triomphant ; inutile de dire qu’il fût châtié et chassé comme le méritait son effronterie.
A quoi tient cependant le succès, même à l’Académie !
Merci pour ce partage 😉 Bonne fête du 14 !
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Avec plaisir et merci !
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châtié!? oh les vilains humains
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Oui, c’est cruel, hein !
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j’apprécie beaucoup.
le chien repu fut châtié !!! on se tourne vers Dostoïevski 🙂 🙂
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Oui !
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Drôle et mignonne cette anecdote, Lydia.
Tant pis, ce chien malheureux a été chassé mais il en a bien profité, un rôti et un après-midi dans le luxe, c’était pas son quotidien 😆
Gros bisous
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Oui, c’est sûr, vu comme ça !
Gros bisous
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😆
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N’empêche que sans ce toutou, qui se souviendrait encore (un peu) du comte de Saint-Aulaire !? qui, au passage, s’appelait Louis de Beaupoil : un chien crotté dans son salon a du le vexer doublement ! 🙂
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😂😂😂
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Oh, l’un des deux aurait pu adopter le chien ! Merci pour l’anecdote.
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Oui, c’est vrai !
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Salopards, va !
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