
Les Bucoliques :
Les Bucoliques comptent dix poèmes qu’on appelle idylles ou églogues. Virgile cite, dès le début de son œuvre, Théocrite, un poète né à Syracuse et dont l’activité s’étend sur les années 270-260 avant notre ère. Représentant de l’esthétique alexandrine, Théocrite était allé chercher ses sujets dans les classes laborieuses (au sens étymologique du terme) de la ville et de la campagne et, à partir d’arguments tirés de la vie quotidienne, il avait composé des poèmes brefs, d’une esthétique soignée. C’est à ce poète que Virgile se réfère pour définir le genre par lequel il commence sa carrière poétique.
Ses poèmes mettent en scène des personnages composant une société étrange, par certains côtés vraisemblable, imaginable même, et par d’autres, irréelle et floue. Ils portent des noms grecs, en référence à ceux des Idylles de Théocrite. Les précisions qu’en donne Virgile ne suffisent pas à dessiner une image claire de la société des Bucoliques. Ce dernier a surtout voulu mettre en place un monde dans lequel les hommes et les dieux vivent en bonne entente.
[La première Bucolique est un dialogue de 85 vers entre deux bergers, Tityre et Mélibée. Ce dernier, exproprié, doit quitter sa terre tandis que Tityre a obtenu d’un dieu, Octave, de pouvoir rester. Le dialogue oppose le malheur de Mélibée et le bonheur de Tityre.]
Extrait : (Traduction de M. Nisard)
Couché sous le vaste feuillage de ce hêtre, tu essayes, ô Tityre, un air champêtre sur tes légers pipeaux. Et nous, chassés du pays de nos pères, nous quittons les douces campagnes nous fuyons notre patrie. Toi, Tityre, étendu sous de frais ombrages, tu apprends aux échos de ces bois à redire le nom de la belle Amaryllis.
TITYRE.
O Mélibée, c’est un dieu qui nous a fait ce sort tranquille. Oui, il sera toujours un dieu pour moi ; souvent un tendre agneau de nos bergeries arrosera ses autels de son sang. Tu vois, il laisse errer mes génisses en ces lieux, et il m’a permis de jouer les airs que je voudrais sur mon rustique chalumeau.
MÉLIBÉE.
Je n’envie point ton bonheur : je m’en étonne plutôt, à la vue de ces champs désolés et pleins de trouble. Moi-même, tout faible que je suis, j’emmène à la hâte mes chèvres ; en voici une que j’ai peine à traîner. Là, entre d’épais coudriers, elle vient, mère plaintive, de mettre bas deux chevreaux, l’espérance de mon troupeau, hélas ! qu’elle a laissés sur une roche nue. Je me souviens (mais mon esprit était aveuglé) que ce malheur m’a été plus d’une fois prédit : des chênes ont été frappés de la foudre devant moi ; souvent du creux d’une yeuse une corneille criant à ma gauche me l’avait annoncé : Mais dis-moi, ô Tityre, dis-moi quel est ce dieu ?
TITYRE.
Cette ville qu’on appelle Rome, ô Mélibée, n’étais-je pas assez simple pour me la figurer semblable à celle de nos contrées, où nos bergers ont coutume de mener leurs tendres agneaux ? Ainsi je voyais ressembler à leurs pères les chiens qui viennent de naître, les chevreaux à leurs mères; ainsi je comparais les petits objets aux grands. Mais Rome élève autant sa tête au-dessus des autres villes, que les cyprès surpassent les vignes flexibles.
MÉLIBÉE.
Et quel motif si grand t’a donné l’envie de voir Rome ?
TITYRE.
La liberté, qui, bien que tardive, m’a regardé dans mon oisif esclavage, quand ma barbe déjà blanchissante tombait sous les ciseaux : enfin elle m’a regardé, enfin elle est venue pour moi, depuis que Galatée m’a quitté, et qu’Amaryllis me tient sous ses lois. Car, je te l’avouerai, tant que Galatée me retenait près d’elle, je n’avais ni l’espérance d’être libre, ni le soin d’augmenter mon épargne ; et quoiqu’il sortît de mes bergeries bon nombre de victimes, quoique ma main ne cessât de presser pour l’ingrate Mantoue le lait le plus savoureux de mes chèvres, elle n’en revenait jamais chargée du plus modique métal.
Et, pour les latinistes :
Extrait du texte latin : Ecloga prima.
Meliboeus
Tityre, tu patulae recubans sub tegmine fagi
siluestrem tenui Musam meditaris auena ;
nos patriae finis et dulcia linquimus arua.
nos patriam fugimus ; tu, Tityre, lentus in umbra
formosam resonare doces Amaryllida siluas.
Tityrus
O Meliboee, deus nobis haec otia fecit.
namque erit ille mihi semper deus, illius aram
saepe tener nostris ab ouilibus imbuet agnus.
ille meas errare boues, ut cernis, et ipsum
ludere quae uellem calamo permisit agresti.
Meliboeus
Non equidem inuideo, miror magis ; undique totis
usque adeo turbatur agris. en ipse capellas
protenus aeger ago ; hanc etiam uix, Tityre, duco.
hic inter densas corylos modo namque gemellos,
spem gregis, a, silice in nuda conixa reliquit.
saepe malum hoc nobis, si mens non laeua fuisset,
de caelo tactas memini praedicere quercus.
sed tamen iste deus qui sit da, Tityre, nobis.
Tityrus
Urbem quam dicunt Romam, Meliboee, putaui
stultus ego huic nostrae similem, cui saepe solemus
pastores ouium teneros depellere fetus.
sic canibus catulos similes, sic matribus haedos
noram, sic paruis componere magna solebam.
uerum haec tantum alias inter caput extulit urbes
quantum lenta solent inter uiburna cupressi.
Meliboeus
Et quae tanta fuit Romam tibi causa uidendi ?
Tityrus
Libertas, quae sera tamen respexit inertem,
candidior postquam tondenti barba cadebat,
respexit tamen et longo post tempore uenit,
postquam nos Amaryllis habet, Galatea reliquit.
namque – fatebor enim – dum me Galatea tenebat,
nec spes libertatis erat nec cura peculi.
quamuis multa meis exiret uictima saeptis
pinguis et ingratae premeretur caseus urbi,
non umquam grauis aere domum mihi dextra redibat.
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L’Enéide

(image d’illustration)
les rivages de Troie aborda le premier en Italie, près de Lavinium ;
longtemps il fut malmené sur terre et sur mer
par les dieux puissants, à cause de la cruelle Junon, à la rancœur tenace ;
il endura aussi bien des maux à la guerre, avant de fonder sa ville
et d’introduire ses dieux au Latium, le berceau de la race latine,
des Albains nos pères et de Rome aux altières murailles. » (source traduction)
Extrait : (source traduction)
Énée se tenait droit, resplendissant dans une claire lumière ;
il avait le visage et les épaules d’un dieu ; car sa mère elle-même
d’un souffle avait donné à son fils une chevelure magnifique,
l’éclat vermeil de la jeunesse et des yeux pétillants de charme :
ainsi des mains artistes rehaussent la beauté de l’ivoire,
ou parent d’or fauve l’argent ou le marbre de Paros.
Alors il s’adressa à la reine et, soudain, à la surprise générale,
il dit ainsi : « Je suis ici devant vous, celui que vous cherchez,
le Troyen Énée, arraché aux ondes libyennes.
Ô toi, tu es la seule à t’être apitoyée sur les épreuves indicibles de Troie,
et nous, restes échappés aux Danaens, qui sur terre et sur mer
avons déjà épuisé tous les malheurs, et sommes totalement démunis,
tu nous associes à ta cité, à ta maison ; te remercier dignement,
ô Didon, est impossible pour nous comme pour les quelques survivants
de la nation dardanienne disséminés un peu partout par le vaste monde.
Si des divinités prennent en compte la piété des hommes,
s’il existe quelque part une justice et la conscience de la droiture
que les dieux t’accordent des récompenses dignes de toi. Quels siècles heureux
t’ont vue naître ? Quels parents si grands ont engendré une fille telle que toi ?
Tant que les fleuves courront vers la mer, tant que dans les montagnes
les ombres parcourront les vallées, tant que le ciel nourrira les étoiles,
toujours subsisteront et ta gloire et ton nom et tes louanges,
où que je sois appelé sur la terre ».
je n’avais gardé de Virgile que les 2 heures de latin du samedi matin (de 8h à 10h!!!) où on ramait…. je n’ai plus jamais ouvert un texte de cet auteur… (et on avait 2 autres heures même créneau bien-sûr, consacrées à « La guerre des Gaules » dont je garde un meilleur souvenir.
Vu de cette manière cela redonne envie.
tu écris plus vite que ton ombre, alors je vais savourer « tranquilou »…
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Non, Eve, je n’écris pas plus vite que mon ombre, je ne fais que transférer les anciens messages.
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c’est bien ce qu’il me semblait..
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😉
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